Assise sur le siège passager de la voiture, elle attendait patiemment que son père revienne vers la voiture. Ça faisait environ une heure et demie qu'elle était là, entrain de chantonner tous les airs qui passaient à la radio. Il était alors comme aspiré par la maison, condamné à ne plus jamais en sortir. Alors qu'une chanson ringarde passée à la radio, chantant alors à tut-tête, son père sortit en trombe de la maison, ouvrant et fermant le coffre violemment pour y enfouir un objet entouré d'un drap. Il retira son chapeau de feutre en rentrant dans la voiture tandis que la jeune fille le fixait avec des yeux bien ronds, comme surprise et en même temps inquiète. "Chérie attaches ta ceinture il faut que je passe chez Clavells." Betsy avait toujours appris à ne rien demander, à ne rien dire même si elle en mourrait d'envie. Cela renfrognait sa nature curieuse qui tournait parfois au vice. Elle colla son dos sur le siège de la voiture et s'attacha sagement collant sa tête à la fenêtre. Il coupa alors par des petites rues, s'engageant sans regarder dans le grand carrefour pour aller se garer dans une petite allée de pierre. La jeune adolescente sortit de la voiture en même temps mais ne le suivit pas à l’intérieur de la maison et avança les mains dans les poches dans le jardin. Elle avait l'habitude. Depuis bientôt dix ans que leurs pères collaboraient ensemble. Elle s'avança alors et fut accueillie par l'épagneul luisant. Aussitôt alors Betsy passa son bras par dessous celui du jeune homme comme un automatisme et il l'entraina alors vers le fond du jardin vers les écuries. "Tu penses qu'on pourra monter demain avec ce temps ?" C'était la période dite "période blanche". En effet du jour au lendemain le soleil pouvait laisser sa place au ciel bas et à la neige. La jeune fille avait toujours été passionnée par les chevaux et c'est avec Eddy qu'elle avait appris. Eddy Clavells avait trois ans de plus qu'elle environ et avait aussi un frère du même âge qu'elle. Elle avait alors grandi avec les deux garçons. Il n'y avait jamais eu aucune ambiguïté entre ce trio depuis plus de quinze ans. "Je pense pas, ma mère a dis qu'il allait verglacer demain mais tu peux toujours venir à la maison." L'étincelle dans les yeux verts de la jeune fille s'éteignit. L'équitation était le seul moyen qu'elle avait trouvé pour aller mieux, pour se sentir mieux et ce moment elle en avait justement besoin. C'était les Clavells qui hébergeaient ses chevaux tandis qu'elle s'occupait de leur chiens de chasse la plupart du temps. Même si l'ambiguïté entre Eddy et Betsy était assez invisible et absente, il n'empêchait que le jeune homme l’attisait. Bien évidemment, il aurait voulu lui coller ses mains sur ses joues pour les réchauffer et inversement elle aurait voulu être réchauffer par ses mains. Seulement elle s'était d'un côté promis de ne jamais tomber dans ce piège, de ne jamais devoir choisir entre l'un ou l'autre si par malheur elle devait choisir. "Je pense que je vas rentrer, je ne suis pas très bien." Ça aussi il l'avait remarqué, mais n'avait pas osé faire la remarque tandis que Marlon les observait de la fenêtre du deuxième entre deux jeux vidéos. Il l'a laissé partir, scrutant alors sa difficulté à lever les pieds du sol froid. Les yeux de la jeune adolescente usaient le parterre mais n'osaient pas se relever.